ALFA ROMEO 155 Q4

par Maxime JOLY

PRESENTATION
Un petit retour en arrière s’impose. Nous sommes en janvier 1992 à Barcelone et Alfa Romeo vient de présenter en avant-première celle qui succédera à la 75. Elle fit ses vrais débuts à Genève , deux mois plus tard. Le design est l’œuvre de l’Institut I.DE.A (Institute of Development in Automotive Engineering) sous la direction d'Ercole Spada qui a commencé comme designer chez Zagato où il se fait remarquer en dessinant l' Aston Martin DB4 GTZ . Pour Alfa Romeo, son premier travail sera la Giulia 1300 Junior Zagato , après quoi il quitte Zagato en 1970 pour rejoindre la direction de Ghia, filiale du géant Ford , puis BMW où il signer ales série 7 e32 et série 5 e34 . Fidèle au style acéré du designer, la 155 se distingue par son arrière haut et massif en opposition avec son capot fuyant vers la calandre située plus près du sol. Il en résulte un profil étrange et on est bien loin des coups de crayon qui ont fait la réputation d’Alfa Romeo. Ce dessin avait au moins un mérite, celui d’aboutir à un Cx de 0,29. A noter que la 155 ne fut jamais déclinée en SW. En addition de la version V6, plus classique , la Q4 vit rapidement le jour pour faire honneur aux véhicules de compétition . Cette appellation fut déjà utilisée sur la 33 (en plus de la version Permanent 4) tandis que la 164 y aura droit un peu plus tard. Il aura fallu attendre la toute fin de vie de la 156 et la sortie du Crosswagon pour la retrouver au catalogue. La philosophie sportive de cette appellation en a d’ailleurs pris un sacré coup… Extérieurement, elle est reconnaissable grâce à ses ailes élargies, des jantes en alliage et des pare-chocs plus généreusement dimensionnés. On peut aussi noter l’ apparition du célèbre trèfle sur la malle arrière, expliquant par la même occasion qu’elle se fasse appeler chez nos amis britanniques Cloverleaf 4. Le restylage opéré fin 1995 mit un terme à son existence. L’ acheteur avait le choix entre deux finitions possibles : la Sport et la Super sur laquelle on retrouve dans l’ habitacle la présence de bois. La Q4 a la même instrumentation que les autres 155 avec par exemple les indicateurs de pression et de température d’huile. De série, elle est livrée avec les sièges semi-cuir (qui manquent de maintien) et le lecteur CD. La climatisation était en revanche une option au catalogue. La qualité de fabrication et le choix des matériaux restent dans la continuité des modèles Alfa de cette époque , c’est-à-dire plus que moyens. Le coffre perd en capacité de chargement , passant de 525 à 410 dm³, à la différence de l’ espace aux places arrière qui figure parmi les meilleurs de la catégorie.

MOTEUR
Ne vous fiez pas à ce qui est frappé sur le couvre- culasse ... ce bloc suralimenté à double arbre à came (contre- rotatif) en tête n’a pas été conçu dans les usines d’Arese mais bel et bien chez le voisin Lancia, en collaboration avec les ingénieurs de l’ancien département Abarth . Ce moteur s'y retrouve en effet dans son écrin le plus célèbre : la Lancia Delta HF Integrale . Le monobloc est en fonte et le vilebrequin est soutenu par cinq paliers, destinés à accueillir autant de demi- coussinets . La 155 Q4 (ou 2.0 TB 4x4 dans les documents officiels de l’époque) fut même le premier modèle à étrenner le moteur de la Delta Integrale dans sa version catalysée. A cause de l’ utilisation d’un précatalyseur et de deux catalyseurs à 3 voies , la puissance passe de 205 à 192 ch. Gavé par un turbo Garrett T3, il bénéficie d’une valeur de couple élevée (291 Nm) et d’un overboost temporaire . Mais ce gros turbo met du temps à se charger et la poussée ne se fait qu’à partir de 3000 tours /min, là encore ne vous fiez pas aux spécificités techniques officielles... Le poids élevé de la Q4 et ce « turbo lag » pénalisent grandement ses performances. Mieux vaut jouer du rapport pour tirer profit de la hargne du 1995 cm³. Et ça tombe bien, la boîte 5 est bien étagée et agréable à l’usage. Bien sûr, avant de pousser les rapports, n’oubliez pas de laisser chauffer les 5,5L d’huile de type 10W40. Et inversement, afin de protéger le turbo, laisser tourner le moteur avant de le couper. Le groupe embrayage - boîte de vitesse – différentiel est relié au moteur à l’arrière est fait partie intégrante du motopropulseur. Un dispositif électronique Marelli -Weber gère l’injection, l’ allumage et la suralimentation. Un refroidissement additionnel de l’intercooler se fait via un réservoir de 25L d’ eau placé dans le coffre servant à pulvériser de l’eau sur l’échangeur. Tous les modèles ne furent pas équipés de cette technologie de brumisation, pourtant nécessaire à l’homologation course, car elle faisait sauter la garantie constructeur… Aberrant pour un système censé améliorer la fiabilité. La vitesse de pointe annoncée par le constructeur italien se hisse à 226 km/h. Une Alfa Romeo récupérant un moteur Lancia fit grincer quelques dents du côté des passionnés du trèfle. Un thème qui trouve de l’écho à l’ heure où les moteurs Arese ont totalement disparu de la circulation et que les Alfa héritent maintenant des blocs fabriqués par Fiat. D’où une certaine pertinence de choisir de parler de la 155 Q4 au moment de fêter le centenaire … Cette erreur ne fut pas rééditée avec la 164 Q4 sortie quelques années plus tard et qui eut droit à une vraie mécanique Alfa, en l’occurrence le V6 de 3 litres de cylindrée.

SUR LA ROUTE
Contrairement à la 75 qui était une propulsion , l'Alfa 155 est une traction qui reprend la base de ses trains roulants à la Fiat Tipo. Sur la Q4, la transmission devient même intégrale grâce à la banque d'organes du groupe Fiat. Comme pour le moteur, la Delta HF Integrale fournit donc aussi sa transmisison à la 155 Q4, à l’exception du rapport de pont qui est un peu plus court pour compenser la différence de poids. Cette transmission intégrale permanente se compose de trois éléments : un différentiel central arrière de type épicycloïdal dont la transmission entre l’avant et l’arrière est la suivante : 47/53, un viscocoupleur Ferguson et un différentiel arrière de type Torsen. Devant les caractéristiques techniques, l’espoir est grand. Transposer le savoir-faire acquis avec la Lancia a de quoi faire rêver… sur le papier. C’est une fois qu’on y regarde de plus près que les choses se gâtent : passage d’une compacte à une berline, hausse significative du poids ou encore moteur moins puissant, les motifs d’inquiétude sont là. L’empattement supérieur et l'amortissemnt plutôt souple rendent le comportement moins dynamique et par voie de conséquence moins efficace que sur la néo cousine Lancia. En outre, la Q4 dispose de la même colonne de direction et crémaillère que les autres 155. Question freinage, l’ABS Bosch à six capteurs venu tout droit de la Delta fait des miracles mais Alfa Romeo n’a pas pris en compte l’embonpoint pris par rapport à la 155 V6, avec qui elle partage ses disques de frein, de diamètre insuffisant (284 mm à l’avant et 240 à l’arrière) pour freiner les 1400 kilos de la bête… Ce poids n’ayant jamais été vérifié par les différents essais presse de l’époque, rajoutant systématiquement pas loin de 100 kilos sur la balance ! L’amortissement contrôlé, vendu en option à l’époque 9.000 Frs, offre le choix au conducteur d’opter pour le mode automatique ou le sport. On ne pas dire que le confort s’améliorait de manière significative, trop ferme pour une berline destinée à avaler les kilomètres et trop souple pour attaquer sereinement des enchaînements d'épingles façon rallye. Les nouveaux pneumatiques Pirelli 700Z 205/50 ZR 15 (contre 195 de large pour la V6) sublimaient les talents de leur compatriote sur sol gras ou mouillé. C’est définitivement dans ce domaine qu’elle prenait toute sa dimension, laissant aux oubliettes son caractère pataud aperçu sur le sec. Intraitable par temps de pluie, on en viendrait presque à se dire qu’il ne faut la sortir que par ce temps… La 75 Turbo pour les jours ensoleillés et la 155 Q4 quand il pleut, voilà une sorte de panoplie rêvée d'alfiste ! Au final, Alfa Romeo semble s’être trop dispersé, faisant trop de compromis et n’est pas allé au bout des choses. A force de vouloir plaire à tout le monde, le risque est de ne plaire à personne. Peu à son aise sur les petites routes, elle n’épargne pas non plus ses occupants lors des longs trajets autoroutiers. Pères de famille, préparez-vous aux «dis papa, quand est-ce qu’on arrive ? »…

> Caractéristiques techniques ALFA ROMEO 155 Q4
Production 1992
Moteur 4 cylindres en ligne
Disposition transversal AV
Alimentation
Cylindrée (cm3)
Alésage x Course (mm)
Taux de compression
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn)
Couple maxi (Nm à tr/mn)
Transmission AV
Boîte de vitesses 5, manuelle
Cx
Freins AV
Freins AR
Pneus AV
Pneus AR
Poids (Kg) 0
Rapport poids/puissance
Consommation moyenne (L/100)
Vitesse maxi (Km/H) 0
0 à 100 Km/H (s)
0 à 200 Km/H (s)
400 m DA (s)
1000 m DA (s)

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